Le Président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz est malade, c’est toute
une nation qui en souffre. L'homme a été
atteint par un tir "ami" selon les sources officielles largement
répandues à Nouakchott. Vrai ou faux?
Cette affaire reste très opaque et départage incessamment les citoyens des plus
ordinaires aux plus officiels. Aucune source par ailleurs n’est assez
plausible. Somme toute les villégiatures du rais ont failli être mortelles.
Dorénavant, le Président préviendra de ses départs et de ses itinéraires avant
que ses côtes soient remplies de cartouches.
Dans cette histoire de tir « ami » ou d’une
« attaque », les rumeurs avaient atteint un degré justifiant
visiblement deux tendances, autrement dit deux signaux : le manque de
patriotisme de nos concitoyens. En temps normal, un chef d’Etat devrait avoir
la solidarité de ses sujets, surtout lorsque sa vie est attenté. Dans des tels
contextes, le respect d’une nation à son Président s’exprime par la solidarité,
car seul un ennemi de la stabilité du pays souhaite la mort du Président de la
République. Le deuxième signal dans cette attaque réside dans le ras-le-bol des
citoyens vis-à-vis des agissements du chef d’Etat. Son comportement arrogant,
son mépris du dialogue et des militants noirs, abolitionnistes et des militants
des droits de l’homme sont autant d’arguments
qui expliquent certaines réactions des Mauritaniens par rapport à cette
affaire.
De ce fait, le pays est
resté suspendu inutilement à un homme, à l’euphorie de sa fougue (pour ses
proches collaborateurs), à son influence (au sein de l’armée) et même à sa
faiblesse.
Le Président est allongé à Paris sur un lit d’hôpital, une inertie
s’abat sur Nouakchott. Et les institutions perdent de jour en jour leur valeur
constitutionnelle. Incroyable placidité. D’où l'impossibilité de prévoir la
vacance du pouvoir. C'est pourquoi les questions telles que : la transparence sur le bilan de santé du
Président, notamment sa capacité physique et morale à diriger le pays, les dispositions
d’élargissement des pouvoirs du premier
ministre, le bras de fer entre l'opposition et les officiers politiques (car
les véritables sont aux frontières pour contrer la menace terroriste et non
dans les salons climatisés de Tavreg-zeina) taraudent les citoyens ordinaires.
Normal, les citoyens ne veulent pas être dirigés, trahis et boire des
mensonges. Les pauvres espèrent encore
des miracles de leur faux ami, car ils ont toujours faim et soif. Les
laudateurs n’ont plus d’oreille pour les écouter. Les opposants n’ont plus
d’homme à dénigrer dans les points de
presse. Les officiers ont besoin d’un mentor. La tribu n’est rien sans un
leader et un représentant au sommet de l’Etat. Le pays est divisé, donc Aziz le
bon et le mauvais doit revenir… Pour que souffle le boutiquier, le charretier,
l’enseignement, le soldat et l’homme politique.
Le pays subit un bavard silence national qui totalise des questions et
des zones d’ombres.
On veut savoir qui tient officiellement les rennes du pouvoir? Sans
doute, ce sont les militaires, mais qu'ils passent le communiqué à la TVM pour que le HCE renaisse de ses cendres, et
que le deuil de l'après-Aziz soit fait. Ainsi, l’éternelle transition
qu’attendait Saleh Ould Hanena depuis 2003 voit enfin jour. Pour que se réalise
le rêve du doyen Ahmed Ould Daddah, à savoir celui d’être le chef d’un
gouvernement. Pour que Jemil Ould Mensour se sente heureux d’avoir chassé pour
la deuxième fois un militaire du pouvoir par ses troupes humaines et
médiatiques. Chimère : Aziz est soutenu par des canons, il faut qu’ils se
retournent contre lui. Cette alternative est jusqu'ici inenvisageable... Ne
rêvons pas ! Des hommes forts proches d'Aziz résistent encore en catimini.
Nous pouvons exiger
d’autres points essentiels et névralgiques.
Et si Aziz revenait tranquillement se réinstaller dans le palais ocre,
la constitution devrait être supprimée car elle n'aura servi à rien durant
cette rocambolesque histoire de tir d’ami. La République peut changer de nom
pour s'intituler "Caserne nationale".
Car à la
place de la Constitution, tout le monde le sait, le pays est tenu par la grande
muette. Que les militaires la tiennent civiquement avant que Dieu ordonne leur
départ. Quand ? Lorsque le peuple le voudra véritablement.
L’attaque du Président de la République a dévoilé un véritable visage
des citoyens. Face à certaines réactions, il convient d’apprendre aux futures
générations le rôle et la place d’un Président de la République. Sous une
condition : Que la personnalité aspirante à diriger la Mauritanie soit
elle-même respectable par sa trajectoire et ses services rendus à la nation. Le
civisme et le patriotisme devraient
aussi être inculqués à ces mêmes générations pour construire un lendemain
meilleur loin du culte des clans et des rumeurs infondées. Leur apprendre que
l’officier, tout comme l’administrateur,
ont le même statut : celui de rendre un service et non se servir de
l’Etat.
Les mentalités rétrogrades et archaïques freinent généralement
l’épanouissement des peuples. En Mauritanie, nous avons nos séculaires maux. Le
régionalisme mine notre société. Le tribalisme gangrène au sein même des
secteurs clés dans lesquels l’esprit patriotique devrait être une qualité
exigée pour chaque individu. Le racisme divise là où l’union des forces et des
compétences sont primordiales. Et l’ignorance des droits et des devoirs
constitue une denrée dans le pays des millions des poètes.
L’école et les médias ont désormais pour rôle de créer un nouveau type
de citoyen ouvert et émancipé. Le respect des institutions prime sur celui des
personnes. Aziz partira mais la constitution demeure. Donc, la Constitution
d’abord.
Bâ Sileye
[email protected]
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