Cette
oppression ne date pas d'aujourd'hui. L’histoire du Noire reste liée au mépris,
à la douleur, à l’humiliation et à la marge de toute société. C’est avec un
grand intérêt que je parcours tous les jours les quelques articles très
réducteurs sur la question de langues qui fait polémique depuis un certain
temps dans notre pays. Certains à travers ces articles font appel à l’histoire
du pays depuis les indépendances jusqu’à nos jours, d’autres plus naïfs font
recours à leurs émotions et sans retenue traitent de tous les maux les auteurs
de leurs frustrations et enfin les plus habiles font semblant de calmer les
esprits en convoquant leur hypocrisie. Il n’est pas rare de voir aussi des
jeunes étudiants sur des sites comme facebook vouloir mobiliser leurs pairs
pour des manifestations pacifiques à travers tous les pays en l’occurrence au
Sénégal, au Maroc, en France etc. pour afficher leur solidarité avec ceux qui
sont restés au pays avec comme slogan « la lutte continue ».
Il n’est pas assez de rappeler à ces jeunes et même à leurs ainés que de telles
initiatives ne changent en rien sur la situation du pays. On n’est pas sur un
terrain d’idées où la réflexion intellectuelle a sa place, ni sur un terrain
démocratique, pour que des manifestations pacifiques ou pathétiques donnent
gain de causes. L’histoire de la Mauritanie est une l’histoire de deux races,
où il y a une oppression des dominants sur des dominés à l’instar de tous les
pays du monde où cette réalité a été enregistrer, c’était le cas de l’Afrique
du Sud avec l’Apartheid, ce fut aussi le cas aux Etats-Unis. Mieux en vertu de
la prétention de la supériorité de l’homme blanc sur l’homme Noir, l’Afrique
noire a connu plus de quatre siècles d’esclavage, puis la colonisation. Un
lecteur non averti peut se demander quel rapport cela a avec ce qui se passe en
Mauritanie ? Mais comme je vais le démontrer toute la problématique est là et
avec elle la solution. Partout où l’homme Noir a connu une injustice, ce n’est
pas un article ou une manifestation pacifique qui lui a rendu justice, non il
l’a obtenu au prix de son sang où celui de son frère. Je n’appelle pas à la
guerre mais malheureusement telle est la réalité et si on convoque l’histoire,
elle me donnera sans aucun doute raison. Car le mépris de l’homme blanc à
l’égard de l’homme noir de quelque nature qu’il soit est un mépris lié à sa
nature. Ça coule dans les veines. Ceux qui se dérobent de cette nature mène un
combat perpétuel, qui à chaque instant de négligence les rattrape, c’est ce qui
illustre certains dérapages des hommes politiques ou quelques grandes figures
qui de faite, le font plus par hypocrisie que par une volonté politique.
Certains utilisent l’argument religieux et soutiennent que l’Islam est un ciment pour la cohésion social. Oui certes mais cela est moins vrai quand il s’agit d’oppresser les noirs, les événements de 89 se sont déroulés au vu et au su de tout le monde. Mieux le président de SOS esclavage en Mauritanie soulignait lors d’une interview le silence complice de certains imam et même ceux qu’on nomme aujourd’hui les « mouftis » du pays sur la situation des esclaves depuis la nuit des temps jusqu’à nos jours. Il faut ajouter que l’islam ne cautionne jamais l’injustice. Il faut peut être rappelé cette histoire qui date du 7ème siécle juste après la mort du Prophète (psl). Durant la période du premier califat, d’Abou Bacr avait combattu certains compagnons pour avoir refusé de donner le droit divin (la zakat), les considérants comme des infidèles. Ceci dit que nous avons la pleine légitimité de combattre pour l’obtention de nos droits si nos frères de nation nous les en privent.
Aujourd’hui comme hier le noir mauritanien reste à la marge de son propre histoire, il faut attendre à chaque fois qu’on l’opprime d’avantage pour se soulever un peu puis redormir. C’est ce qu’a plaidé dédaigneusement d’ailleurs un de vos frères blancs « les chiens aboient et la caravane passe », comme pour vous dire «quelqu’un soit vos réactions cela ne nous empêche guère de mener à bon plan notre volonté politique ». Cette réalité est si manifeste que les conditions du noir dans ce pays ne fait qu’empirer de jours en jours. A l’heure actuelle on assiste à des manifestations ici et là.
Le 02 avril prochain ,des étudiants mauritaniens en France se feront humiliés face à deux oppresseurs, un personnel du consulat indifférent même face aux revendications les plus élémentaires (la dernière manifestation au sujet des bourses en est une belle illustration) et ses anciens colonisateurs qui se montreront comme arbitres , avec un protocole journalistique plus que jamais hypocrite car la France ne s’est jamais positionnée face aux multiples dérives de l’Etat mauritanien à l’égard des noirs.
Enfin que dire nos leaders, aujourd’hui ils ont fait en sorte qu’il y ait des contradictions entre nos principaux leaders. Il est regrettable de voir des divergences entre deux frères qui ont partagé la même cellule en prison, qui ont subi les mêmes tortures à walata. Celui qui se veut aujourd’hui comme le chef du mouvement des forces de libération des noires en Mauritanie ne s’entend pas avec le leader politique de la communauté noire. Chacun accusant l’autre de tous les maux, qui a raison qui a tord ? Pourquoi pas mettre nos différences de coté et nous réunir au tour du l’essentiel?
Au niveau des jeunes étudiants, chacun veut se faire un nom avant même d’être quelqu’un ou de faire quelque chose. Le S-G du SNEM n’a aucune notion de syndicat comme si tout se résume à faire des grèves des années universitaires durant, alors que le but est de former une masse estudiantine consciente, une élite capable d’apporter un changement. Mais non, « premier à déclencher une grève, premier à fuir à l’arrivée des forces de l’ordre ». Comment peut-on imaginer un syndicat dépourvu de toute idéologie, d’objectifs clairs avec des membres conscients et conséquents.
Je dirai que le changement est possible si on veut l’obtenir. Mais il va falloir qu’on sort des rêves de la jeunesse, qu’on tient compte de l’expérience de nos aînés et celles des autres, qu’on apprenne à se mieux connaître par la vie, par l’histoire du temps passé et du présent de notre pays et par la lecture des véritables intellectuels et patriotes et de n’avoir pas le jugement paralysé par des préjugés trop endurcis pour résumer les choses. Il faut, que l’on cesse de rêver ou de se comporter comme des adolescents. C’est seulement à partir de ce moment qu’on pourra relever le défi et ainsi changer cette situation douloureuse et pathétique que nous subissons au quotidien dans ce pays. Arrêter de grâce de reprendre des slogans dépourvus de sens (la lutte continue) comment une lutte qui n’a pas commencé pourrait-elle alors continuer ?
Cheikh Tijani Gueye étudiant-chercheur à la Sorbonne ( paris5)
chgeye@yahoo.ftr
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