N’eût été le bruit provoqué par certains députés de l’opposition, la
loi contre le terrorisme, que la chambre basse du parlement vient
d’adopter, aurait passé comme une lettre à la poste.
Préparée en
catimini et présentée à la hâte, elle semble plus répondre à une
demande extérieure qu’à un impératif de politique intérieure.
Bien
que notre pays a connu deux enlèvements de citoyens européens, en
novembre et en décembre 2009, et que la menace terroriste est devenue
une réalité vécue sur le sol national, tout cela ne justifie pas
l’adoption d’un texte législatif avant d’engager un débat sur cette
question qui est loin de faire l’unanimité nationale contre elle.
L’examen du texte de cette loi rappelle les lois, très décriées,
promulguées par l’administration Bush au lendemain du 11 septembre et
sur la base desquelles, bien des crimes avaient été commis par cette
équipe et un lieu de détention, Guantanamo, a été créé pour servir de
cachot aux combattants islamistes. Cette prison très particulière
constitue, aujourd’hui, une épine dans les pieds du nouveau président,
que l’on a présenté plus respectueux que son prédécesseur pour les
droits élémentaires des hommes.
Pour
quelle raison le pouvoir mauritanien emprunt-il maintenant ces sentiers
battus ? On ne sait pas trop. Toujours est-il que cette loi continue
d’entretenir le flou le plus total sinon sur l’essentiel du moins sur
un point capital : la définition même du terrorisme. Un point de
discorde entre l’occident et l’Orient que l’administration a voulu
contourner en l’ignorant royalement et en passant à ce qui semble
l’intéresser principalement : les sanctions et surtout les nouvelles
dispositions qui permettent de prolonger les garde-à-vue à plus de
quatre années. Les domiciles des citoyens peuvent être violés à
n’importe quel moment de la journée et les communications peuvent être
écoutées librement par la police (ce dernier point ne constitue pas une
nouveauté, car la police mauritanienne n’avait pas besoin d’une telle
autorisation pour la simple raison qu’elle s’autorisait à écouter
impunément tout le monde).
Au-delà du fait que toute limitation des
libertés publiques constitue une abdication devant le terrorisme, la
nouvelle réglementation qui incrimine ce fléau en Mauritanie fait peur
à tous les démocrates qui rêvaient d’un Etat respectueux des droits
fondamentaux de l’être humain tels que définis dans la déclaration
universelle des droits de l’homme et des peuples.
Ce qu’il faut
surtout craindre dans une situation comme la nôtre, c’est
l’instrumentalisation de ce texte par le pouvoir afin de limiter les
libertés et d’étouffer toutes les voix discordantes. Dans le cas
échéant, on ne pas exclure de voir, un jour, un opposant qualifié de
terroriste et jugé en tant que tel. Chez nous, une longue tradition
d’inféodation de la justice à l’exécutif fait bien craindre ce genre de
scénarios
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